Ce lieu se définit comme un « tiers-lieu solidaire et coopératif pour consommer, échanger, transformer et produire son alimentation ». Il vise ainsi une approche systémique de l’alimentation et fait référence à des valeurs fortes : la solidarité, l’égalité des postures et des savoirs, la justice alimentaire, qui agissent comme autant d’objectifs à atteindre. Il comprend une épicerie solidaire, un jardin partagé, des ateliers de travail notamment.
L’épicerie solidaire alimentée de produits locaux a vu le jour en septembre 2020. Les producteurs locaux fournissent une variété de produits qui sont choisis par une commission constituée des membres de l’association, composition qui tourne afin de permettre une transmission des compétences et de limiter toute forme d’appropriation de cet espace. L’épicerie est ouverte jour et nuit, des bénévoles y tiennent des permanences à certains moments pour renseigner les acheteurs sur le projet. Chacun paie en toute autonomie en fonction de ses achats.
Pour ce faire, le projet cherche à renouveler la structuration de la réponse aux besoins sociaux via un modèle économique qui s’oriente vers une économie dite populaire (qu’ils nomment « familiale »), c’est-à-dire « l’ensemble des activités économiques et des pratiques sociales développées par les groupes populaires en vue de garantir, par l’utilisation de leur propre force de travail et des ressources disponibles, la satisfaction des besoins de base, matériels autant qu’immatériels ». Les porteurs de projet ont dédié ⅗ de leur temps personnel au projet, un investissement humain important. Cette construction repose sur l’apport de chaque participant en termes de force de travail, de temps mis à disposition, de compétences, afin de répondre aux besoins pour le fonctionnement du lieu.
La solidarité est redéfinie ici dans sa dimension globale : elle est le sentiment de responsabilité et de dépendance réciproque au sein d’un groupe de personnes qui sont moralement obligées les unes par rapport aux autres. Ainsi, les problèmes rencontrés par l’un ou plusieurs de ses membres concernent l’ensemble du groupe. La solidarité conduit l’homme à se comporter comme s’il était directement confronté au problème des autres, sans quoi, c’est l’avenir du groupe (donc le sien) qui pourrait être compromis. Souvent une vision restrictive de la solidarité prévaut, sur un mode binaire : elle s’exerce dans un mouvement unilatéral, en direction des personnes défavorisées.
Le projet de La Grange de Gros Puy met en oeuvre une conception plus large de la solidarité, en mettant l’accent sur l’interdépendance entre ses membres, ce qui renouvelle grandement l’approche des tiers-lieux nourriciers tels qu’ils peuvent exister par ailleurs.